Campagnes et actions directes

De nombreuses campagnes ont eu lieu contre les compagnies qui tirent profit de la détention, et ce dans différents pays, mais il est pertinent de présenter les cas des Pays-Bas, de la Belgique et du Royaume-Uni, où ces campagnes ont eu le plus d’ampleur.

En 2010 aux Pays-Bas, une campagne contre Bam, entreprise de construction qui développe le nouveau grand complexe de détention de Schiphol, a été lancée. Un site Internet a été créé pour la campagne, imitant le style graphique de Bam, afin de répertorier et diffuser les actions entreprises contre la compagnie5. Quelques manifestations bruyantes en face des bureaux et une fausse désinfection (en présence des médias) ont eu lieu au siège central de la compagnie6. La fausse désinfection a largement attiré l’attention des médias : 20 activistes habillés en combinaisons blanches de protection ont tenté de nettoyer l’entièreté du bâtiment du sale business de la compagnie. Une nuit, trois bureaux de la firme ont vu leur cerrures bloquées par de la colle et leurs bâtiments tagués. Le directeur de Bam PPP a vu sa maison enduite de peinture rouge et de graffitis, et diverses petites actions de communication et autres petits sabotages ont eu lieu (comme des graffitis sur des bureaux et des lieux de travaux ou la diffusion d’autocollants dénonçant les agissements de la compagnie). En octobre 2011, le chantier du complexe de Schiphol a été bloqué par des activistes qui se sont attachés au portail de 5h à 10h du matin, jusqu’à l’intervention d’une unité spéciale de la police7. D’autres actions militantes ont eu lieu : trois remorques ont été brûlées sur différents chantiers de la compagnie89. Une action de piratage inhabituelle a même eu lieu : la veille de l’annonce officielle des résultats financiers annuels, un faux communiqué de presse de Bam présentant une déclaration financière avec de terribles résultats économiques a été envoyé à un grand nombre d’acteurs financiers et de membres de la presse financière10. Les médias traditionnels ont souvent rapporté de telles actions et le Métro néerlandais a qualifié les activistes comme un problème d’envergure pour ces compagnies11.

Ce n’est pas la première campagne d’envergure aux Pays-Bas : de 2007 à 2010 a eu lieu la campagne DC16. Celle-ci était dirigée contre la construction et la gestion du nouveau centre de détention et d’expulsion de Rotterdam par le consortium DC16 et elle ciblait les firmes faisant partie du consortium. Un site web a été créé, reprenant des informations sur les compagnies participant au consortium et sur les actions dont elles ont été la cible12. La campagne incluait des dizaines d’actions publiques comme des manifestations bruyantes et des die-ins, ciblant d’une part le site de construction et d’autre part les bureaux des collaborateurs (principalement des architectes, des ingénieurs et des développeurs). Quelques visites à domicile ont également été réalisées chez les managers de ces firmes (des maisons ont été taguées et aspergées de peinture rouge, et quelques voitures ont vu leurs pneus dégonflés)13. Le siège d’une compagnie a été occupé. Le 25 mars 2010, le site de construction du centre de détention a été bloqué par une cinquantaine d’activistes14. D’autres actions militantes ont encore eu lieu : le site de construction du centre de détention et les bureaux de Strukton, une compagnie d’ingénieurie civile participant au consortium, ont été incendiés, respectivement en août 2009 et en juin 20101516171819.

Au Royaume-Uni, ce sont principalement les compagnies gérant les centres de détention qui ont été la cible d’activistes. Parmi elles, les grandes sociétés G4S, Serco, GEO Group Inc. et l’association caritative Barnardo’s. G4S gère cinq établissements pénitentiaires au Royaume-Uni, Serco en gère trois et GEO Group Inc. en gère un20. Des manifestations et des sit-ins ont eu lieu contre ces compagnies, et GEO Group Inc. a été victime d’une action de hacking qui a défiguré ses sites Internet21. Barnardo’s a été la cible d’une campagne, incluant des manifestations, des communiqués de presse, des occupations de leurs bureaux, la perturbation d’évènement publics et un blocage de leur ligne téléphonique22.

En Belgique, même si aucune campagne officielle n’a été lancée, différentes actions ont eu lieu, principalement contre les compagnies impliquées dans la construction du nouveau centre fermé 127ter, particulièrement contre le principal constructeur Besix. La sûreté de l’Etat belge a rapporté que, en 2010 uniquement, des dizaines d’actions ont eu lieu contre la construction du centre. De nombreux dégâts ont eu lieu sur le site, une manifestation est parvenue sur le site, le site de construction a été bloqué pendant une journée par 50 activistes. Au final, la construction a été achevée, mais avec un retard d’un an et demi. Durant les travaux ont eu lieu des désagréments inexliqués, comme les portes livrées avec la poignée dans le mauvais sens, ralentissant l’achèvement du bâtiment23. Un blog reprenant toutes les compagnies et les professionnels impliqués dans la construction du centre a été créé. Différentes actions ont eu lieu contre ces compagnies, loin du site du 127ter, à travers le pays, visant principalement Besix. Elles allaient de graffitis jusqu’à des dommages plus sérieux. En voici quelques exemples : en octobre 2010, un site de construction de Besix et le bureau d’architectes Bontinck (qui a dessiné le 127ter) à Gand ont été simultanément victimes d’un incendie24 ; en octobre 2009, une vingtaine de personnes masquées attaquèrent les bureaux de Besix à Gand, causant d’importants dommages25.

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