Introduction

Depuis plus de dix ans, dans tous les pays européens, ont lieu des campagnes et actions contre les entreprises prenant part à l’expulsion et à la détention de migrants illégaux. Les premières campagnes se sont centrées sur les compagnies aériennes : plusieurs actions ont été effectuées contre différentes compagnies aériennes (Lufthansa, Air France, Swissair, Sabena, British Airways, Iberia…).

Dans différents pays, des actions ont eu lieu dans les aéroports pour empêcher des expulsions, particulièrement en parlant aux passagers afin que ceux-ci forcent le désembarquement des migrants. Quelques compagnies aériennes ont renoncé, au moins officiellement, à accepter des expulsions forcées sur leurs vols, ou ont réduits le nombre d’expulsés qu’ils acceptaient à leur bord ; des exemples concrets peuvent être donnés avec la Sabena, Air Afrique, Swiss Air, KLM et la Lufthansa12.

Dans les dernières années s’est développé un processus de sous-traitance des structures de détention et de la mise en œuvre des expulsions, dans lequel on peut constater la prise de responsabilité de compagnies privées dans des tâches autrefois effectuées par des corps étatiques. Pour cette raison également, les campagnes de lutte contre les expulsions ont élargi leur spectre d’action et ont commencé à se concentrer sur les compagnies de construction et les bureaux d’architectes qui construisent et réparent les centres de détention, les compagnies et les associations caritatives qui gèrent les installations de détention, les compagnies fournissant des gardes et d’autres services comme la restauration et la logistique.

Différentes actions et déclarations ont été effectuées contre les compagnies pointées du doigt comme profiteuses. Celles-ci vont de la déclaration publique, des communiqués de presse et des stratégies de communication destinées à ruiner la réputation de ces compagnies, aux manifestations et sit-ins publics, en passant par des actions illégales (incluant des actes de vandalisme et de sabotage) visant à causer des dommages économiques directs à ces compagnies. Les directeurs de ces compagnies ont parfois reçu des visites à leur domicile ; des actions de piratage ont également eu lieu. Des listes noires de compagnies impliquées ont été rendues publiques sur Internet et diverses grandes compagnies hautement impliquées dans ce type de business ont été la cible de campagnes publiques et de différents types d’action directe.

Les dommages économiques produits par ces campagnes sont importants. Tout d’abord, la mise au pilori d’une compagnie érode sa réputation (risque de réputation). En second lieu, les actions directes causent un impact économique négatif direct sur une compagnie et perturbe ses activités (risque économique). Les blocages, les sabotages et autres perturbations affectent le fonctionnement quotidien de la compagnie, occasionnent des pertes de biens, etc. En outre, les campagnes et actions directes causent des dommages indirects, aussi importants que les dommages directs. Les compagnies doivent se réorganiser afin d’améliorer leur sécurité, leurs délais de livraison augmentent, et elles sont moins fiables aux yeux de leur clients.

Le but de ce rapport est d’illustrer à quels risques s’expose une compagnie en choisissant de participer au business de la détention et de l’expulsion.

Ce rapport commence par illuster brièvement la honteuse détention d’illégaux dans des centres fermés européens. Dans le second chapitre, nous traitons de diverses campagnes et actions directes dirigées contre des compagnies impliquées dans ce secteur et en faisons la liste. Dans le troisième chapitre, nous présentons quelques listes noires européennes publiées à propos des profiteurs de la détention. Nous analysons finalement l’impact économique et l’impact sur la réputation de telles campagnes, en basant nos considérations principalement sur l’ « Instituut voor Veiligheids- en Crisismanagement »1.

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